Billet n°8 - Les comptables et l’incertitude par Jack Aschahoug
Voici une citation extraite d’une interview d’un Directeur Administratif et Financier : « J’ai souvent observé que les gens qui ont le profil comptable ont souvent du mal à évoluer vers un poste de DAF car ils ne sont pas à l’aise avec l’incertitude ». Passons sur le caractère quelque peu condescendant de ce jugement, et intéressons-nous plutôt au trait de caractère allégué des « techniciens du chiffre », comme on les qualifie parfois. Les comptables ont-ils donc peur de l’incertitude ?
A y regarder de près, la comptabilité n’est jamais qu’un ensemble de conventions plus en moins complexes, destinées à traduire en nombres des activités économiques et des patrimoines entrepreneuriaux : la seule certitude qui en ressort est que les débits doivent être égaux aux crédits ! Tout le reste n’est que résultat de l’évaluation en termes monétaires des actifs, passifs, charges et produits de l’entreprise. Or, qui dit évaluation dit par nature jugement, appréciation, donc incertitude. Vu sous cet angle, comment les comptables pourraient-ils craindre l’incertain, quand le tréfonds de leur métier repose précisément sur lui ?
A cela s’ajoute, d’origine plus récente, l’immixtion dans les évaluations comptables de la volatilité des marchés : le sacro-saint principe du « mark to market » a envahi les plans comptables, fragilisant encore un peu plus, s’il en était besoin, les certitudes de nos techniciens du chiffre.
Alors bien sûr, les normes comptables constituent des référentiels commodes. Et comme leur observance est obligatoire certains comptables en viennent sans doute à oublier l’univers incertain de leur métier. C’est sans doute à ces comptables-là que songeait notre DAF. Mais d’autres au contraire savent relativiser : ceux-là sont « à l’aise avec l’incertitude » et devraient donc conserver toutes leurs chances pour « évoluer vers un poste de DAF ».